La gouvernance de l’agroforesterie en Île-de-France. La transition agro-écologique entre la PAC et les dynamiques territoriales

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Katharina Bäumler a soutenu son mémoire de fin d’études en Master de Développement International (Sciences Po Paris) le 25 mai dernier.

Katharina Bäumler a rédigé une recherche sur les politiques publiques autour de l’agroforesterie, appliquées à la région Ile-de-France, sur la base d’entretiens avec les acteurs institutionnels et associatifs de la région.
Le mémoire est intitulé « Agroforestry Governance in Île-de-France. Agro-Ecological Transition between Territorial Dynamics and the EU’s Common Agricultural Policy » et est disponible dans la base documentaire.

Résumé

L’agroforesterie (AF) joue un rôle clé dans la transition vers l’agro-écologie (AE) pour transformer profondément le système agro-alimentaire de l’Union Européenne. Ce mémoire de fin d’études pose donc la question du rôle qu’ont joué les instruments de politiques publiques de la Politique Agricole Commune (PAC) de l’UE dans le développement de l’agroforesterie en Île-de-France (IDF) depuis 2015. Il compare aussi leur influence avec celle des mobilisations et des dynamiques territoriales plus spontanées. Cette étude s’appuie sur le matériel de 31 entretiens.

L’accent est mis sur la façon dont les instruments de la PAC interagissent avec les dynamiques territoriales pour former des dispositifs de gouvernance polycentrique. De ce fait, le rôle de la conception des politiques ainsi que les enjeux administratifs liés à la mise en œuvre régionale de la PAC se situent au centre de l’analyse. Les entretiens permettent aussi l’identification de variables explicatives supplémentaires qui déterminent le nombre et la qualité des projets agroforestiers, mais aussi l’intérêt croissant des territoires en IDF pour l’AF.

En examinant les relations entre les acteurs au sein et entre les niveaux de gouvernance, le travail démontre que l’agroforesterie, telle que conçue par l’UE comme « panacée » au sens d’Elinor Ostrom (2010), ne reflète pas correctement la réalité et la diversité des systèmes agroforestiers concrets en IDF.

Alors que les territoires d’IDF ont relativement peu sollicité les mécanismes de la PAC dans la période concernée, la qualité et quantité des projets agroforestiers ont augmenté. Pour expliquer ce paradoxe, l’analyse montre que les obstacles décisifs à la prise en compte des mécanismes sont le degré de ciblage des mécanismes ainsi que le type et la structure des bénéficiaires. Au niveau de la mise en œuvre et de l’administration, le manque de souplesse de la procédure de candidature, ajouté au manque d’information et de connaissance conduisent à une faible sollicitation des mécanismes.

En conséquence, les acteurs territoriaux sont désillusionnés par le système d’action publique agroforestier, et adoptent une attitude de détachement à son égard. La gouvernance du développement de l’AF repose donc essentiellement sur des entités décentralisées de la société civile pour délivrer ses services en complément ou en parallèle des politiques publiques.

En conclusion, la clé essentielle du développement de l’AF réside dans les dynamiques territoriales organisées en structures de gouvernance polycentrique qui viennent suppléer ou compléter l’offre publique. L’intention manifestée de l’UE pour un ‘verdissement’ de la PAC ne se traduit pas encore en pratique, mais a plutôt mené à une construction règlementaire complexe qui tend à consolider l’agro-industrie productiviste sous un nouveau paradigme vert.

Au lieu d’imposer par le haut une transition agro-écologique par l’AF, les politiques publiques devraient plutôt créer un cadre incitatif pour les dynamiques territoriales. Ceci consisterait à faciliter les processus administratifs, mais aussi à inclure toutes entités du système agro-alimentaire dans les processus de décision et de mise en œuvre en adoptant une approche davantage ‘bottom-up’.